Rapports quotidiens

8 April 2011

L’utilisation d’enfants soldats va à l’encontre des valeurs de M. Lubanga

Par Judith Armatta

Le deuxième jour de sa comparution, le secrétaire particulier de Thomas Lubanga Dyilo a témoigné que l’utilisation d’enfants dans des actions militaires allait à l’encontre des valeurs de M. Lubanga. C’est tout simplement une chose qu’il n’aurait jamais faite. Michel Angayika Baba a dit qu’il était presque en permanence avec M. Lubanga de septembre 2002 à mai 2003 et n’a jamais vu de mineurs parmi ses gardes du corps ou dans son entourage.

M. Lubanga est en procès à la Cour pénale internationale (CPI), pour les crimes de guerre de recrutement, conscription et utilisation d’enfants soldats en 2002 et 2003 en République démocratique du Congo (RDC).

En réponse aux questions de l’avocat de la défense, M. Baba a déclaré que lui et M. Lubanga ont remarqué la présence d’enfants parmi les forces du Parti pour l’Unité et la Sauvegarde de l’Intégrité du Congo (PUSIC), commandé par le chef Kahwa lors d’un rassemblement tenu à la suite de la reprise par le FPLC de Bunia des mains de l’Uganda People’s Defense Forces (UPDF) en mai 2003. Ils étaient habillés en partie d’uniformes militaires et portaient des armes. Il a expliqué que les enfants ont été armés par l’UPDF pour se défendre quand les ougandais ont fui le territoire. A cette époque, le PUSIC travaillait avec l’UPDF, mais avait peu de temps après rejoint les Force patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), la branche militaire de l’organisation de M. Lubanga.

Le président Lubanga a pris un décret d’urgence ordonnant leur démobilisation, selon le témoin. Il a ajouté que l’ordre a été exécuté et qu’on a demandé à l’organisation non gouvernementale catholique Caritas de veiller à la réintégration des enfants dans la communauté.

Le procureur Manoj Sachdeva a pressé le témoin de divulguer la présence d’enfants dans les FPLC. M. Baba a admis ce fait mais a expliqué que les enfants suivaient les soldats pour obtenir de la nourriture et de la protection et les considéraient comme des figures paternelles. Ils leur demandaient des vestes et des pantalons. En retour, les enfants étaient invités à transporter du matériel militaire. Ils n’étaient pas formés pour être des soldats, a souligné M. Baba. Il ne connaissait aucune procédure utilisée par le FPLC pour vérifier l’âge des soldats.

M. Sachdeva a présenté un document daté du 12 février 12, 2003, pour appuyer son argument voulant que les FPLC aient utilisé des enfants comme soldats. Dans ce document, le secrétaire national à l’éducation et à la jeunesse a informé le commandant du G-5 des FPLC à Bunia que les enfants soldats âgés de 10, 15 et 16 qui étaient prêts à réintégrer la vie civile devaient être démobilisés et désarmés. Le document a été envoyé en ampliation au président Lubanga. M. Baba a répondu que le programme de démobilisation s’appliquait à tout le monde et était un programme international pour la région, y compris le Rwanda et le Burundi, et pas seulement pour la RDC. M. Sachdeva a souligné que le document indiquait que le programme était limité aux enfants soldats de 10 à 16 ans qui ont accepté d’être démobilisés, ce qui implique que les enfants qui ne voulaient pas être démobilisés pouvaient demeurer dans les FPLC. Le témoin ignorait la raison pour laquelle le Secrétaire national avait mis cette restriction dans le document et a insisté sur le fait que le programme s’appliquait à tout le monde. M. Baba ne voulait pas non plus admettre que M. Lubanga avait annulé le programme, comme le laissait entendre M. Sachdeva.

Le procureur a interrogé le témoin sur un meeting qui aurait été tenu par M. Lubanga le 12 février, 2003 en vue de remonter le moral des troupes à un moment où de grandes batailles étaient livrées. M. Sachdeva a laissé entendre que tout ceci montrait que la démobilisation était bien la dernière chose que l’Union des patriotes congolais (UPC) pouvait se permettre de faire. M. Baba ne se souvenait pas de l’événement. Bien que le procureur lui ait rappelé son témoignage antérieur selon lequel il était presque toujours avec M. Lubanga pendant cette période, et que, en tant que son secrétaire particulier, il s’occupait de son calendrier. M. Baba a répété qu’il ne savait rien du meeting.

M. Sachdeva a interrogé le témoin sur les plaintes adressées par l’Organisation des Nations Unies et d’autres organisations internationales à M. Lubanga sur le recrutement d’enfants soldats. M. Baba a répondu qu’il était au courant de plaintes, mais les a rejetées, en disant les mouvements rebelles sont généralement critiqués pour leur donner une mauvaise réputation.

Face à un reportage, diffusé sur la radio de la Mission militaire d’observation de l’ONU au Congo (MONUC) le 7 février 2003, à l’effet que M. Lubanga avait exigé que chaque famille sous son contrôle envoie volontairement un enfant afin de contribuer à la réalisation de l’objectif militaire de l’UPC, le témoin a dit que c’était possible, mais qu’il ne s’en souvenait pas. Il ne pouvait pas non plus se rappeler que M. Lubanga s’est plaint qu’il n’avait jamais été informé que l’UPC ne pouvait pas recruter d’enfants, comme l’a laissé entendre le procureur.

Le contre-interrogatoire de M. Baba reprend mardi matin.

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