Rapports quotidiens

1 Novembre 2010

Deuxième comparution d’un intermédiaire qui fait tout son témoignage à huis-clos

Par Taegin Stevenson

Un intermédiaire, dont le témoignage a été interrompu en juillet dernier par la suspension de l’instance au procès pour crimes de guerre de Thomas Lubanga à la Cour pénale internationale (CPI), a pris aujourd’hui de nouveau la barre des témoins. Toutefois, il a fait toute sa déposition à huis clos.

Le témoin, désigné par le nom de code « intermédiaire 321 », a témoigné pendant deux jours en juillet dernier lorsque les procureurs ont refusé de communiquer à la défense de M. Lubanga l’identité d’un autre intermédiaire, ce qui a incité les juges de première instance à suspendre le procès. La défense avait déclaré qu’il lui fallait connaître l’identité de l’« intermédiaire 143 » avant de poursuivre le contre-interrogatoire de l’« intermédiaire 321 », qui était l’une des personnes qui ont communiqué avec les enfants congolais ayant témoigné contre M. Lubanga.

Au début de la séance d’aujourd’hui, l’avocat de la défense Jean-Marie Biju-Duval a déclaré qu’il lui serait difficile de poser des questions sur l’« intermédiaire 321 » en séance publique. Alors que l’avocat de la défense avait déclaré qu’il allait essayer de procéder au contre-interrogatoire du témoin en séance publique, il n’avait, à la fin de la première journée, pas posé une seule question en audience publique.

Les témoins de la défense ont dans le passé, impliqué l’« intermédiaire 321 » dans des irrégularités, y compris le coaching et la subornation de témoins soi-disant pour qu’ils témoignent à la cour qu’ils avaient servi comme enfants soldats dans la milice que, selon les procureurs de la CPI, M. Lubanga a commandée en 2002 et 2003.

Selon les procureurs, M. Lubanga a recruté et enrôlé des enfants dans l’Union des patriotes congolais (UPC) et sa milice alliée- les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC) – et les a utilisés pour combattre dans des conflits interethniques en République démocratique du Congo (RDC). M. Lubanga a nié les accusations, arguant qu’il n’était pas en charge des affaires militaires du groupe dont il aurait été le dirigeant, selon les procureurs de la CPI.

Les juges ont demandé à des intermédiaires et des enquêteurs du Bureau du Procureur (BdP) de témoigner, à la suite des affirmations persistantes par les témoins de la défense que certains des fonctionnaires qui ont travaillé pour le BdP ont joué un rôle dans la falsification des preuves. Une fois que les intermédiaires et les enquêteurs auront terminé leur témoignage, la défense de M. Lubanga envisage de demander aux juges de classer l’affaire au motif de procédure abusive orchestrée par des agents du BdP.

Selon le juge président Adrian Fulford, l’« intermédiaire 321 » était censé faire son témoignage la semaine dernière. Toutefois, en raison d’une mauvaise communication entre l’Unité d’aide aux victimes et aux témoins (VWU) de la Cour et le Bureau du Procureur, le témoin s’est rendu à La Haye la semaine passée plutôt qu’à l’endroit du Congo à partir duquel il devait faire le reste de son témoignage par vidéoconférence. On ne sait pas si la déposition de ce témoin a aujourd’hui été faite par vidéoconférence ou devant la Cour.

Entretemps, pendant quelques brefs moments d’audience publique aujourd’hui, l’avocat principal de la défense Me Catherine Mabille a indiqué aux juges que l’Accusation n’avait pas répondu à leur demande faite il y a huit jours de fournir des informations complémentaires sur l’« intermédiaire 143 ». Selon elle, ce témoin a rencontré d’autres personnes qui sont venues témoigner au cours de 2005 et 2007. « Il faut que cette information nous soit communiquée dès que possible », a-t-elle dit.

Lorsque le juge Fulford a posé des questions au procureur Manoj Sachdeva sur les divulgations qui n’avaient pas encore été faites concernant l’« intermédiaire 143 », il a répondu que « tout ce qui pouvait être divulgué a été divulgué » en ce qui concerne l’interrogatoire de l’« intermédiaire 321 ».

Toutefois, M. Biju-Duval a insisté sur la fait qu’ils étaient toujours en attente de toutes les informations pertinentes remontant à avant 2007.

Il a ajouté : « Je suis prêt à commencer l’interrogatoire de [l’intermédiaire] 321, mais je tiens à informer la Chambre que, malheureusement, la quasi-totalité de mon interrogatoire devra être faite à huis-clos ». Il a expliqué que le témoin serait interrogé sur plusieurs noms non protégés « et il serait artificiel de notre part d’attribuer des pseudonymes ».

La Cour a siégé à huis-clos tout le reste de la journée, et il n’a pas été possible de savoir si ce témoin avait fini sa déposition.

Le procès continue demain.

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