- Le procès de Lubanga devant la Cour pénale internationale - https://french.lubangatrial.org -

Les victimes disent que la remise en liberté de Lubanga mettrait leur vie en danger

Les victimes participant au procès de Thomas Lubanga qui est accusé de crimes de guerre ont dit aux les juges d’appel que la libération de l’ancien chef rebelle congolais mettrait leur vie en danger.

Dans un document déposé à la Chambre d’appel, un représentant légal des victimes a fait valoir que la Chambre de première instance présidée par le juge Adrian Fulford a commis une erreur lorsqu’elle a suspendu le procès le 8 juillet 2010, et ordonné la remise en liberté de M. Lubanga une semaine plus tard .

« Comme cela a été le cas depuis le début du procès, il y a toujours le risque que M. Thomas Lubanga peut se soustraire à la compétence de la Cour, surtout maintenant qu’il est au courant de toutes les preuves qui existent contre lui », a déclaré Paolina Massidda, le Conseiller principal du Bureau du conseil public pour les victimes à la Cour pénale internationale (CPI).

Mme Massidda a ajouté dans une déposition du 23 août 2010 que, puisque M. Lubanga connait maintenant l’identité de tous les témoins, et étant donné que la situation en République démocratique du Congo (RDC) est encore instable, sa libération pourrait « aujourd’hui plus que jamais mettre sérieusement en danger la sécurité des victimes et des témoins impliqués dans l’affaire. »

Le ministère public a interjeté appel de la suspension du procès et de la décision de remise en liberté rendue par les juges du procès. M. Lubanga, qui est accusé de conscription, enrôlement et utilisation d’enfants soldats dans les conflits armés, restera en détention à la CPI jusqu’à ce que les juges d’appel rendent une décision. La Chambre d’appel a autorisé les deux victimes à prendre part aux deux appels.

Mme Massidda soutient que les juges de première instance ont ordonné la libération sans conditions de M. Lubanga, sans tenir compte des risques que pourrait entraîner cette libération ou sans procéder à l’évaluation de ces risques. Elle a dit que parmi ces risques il y avait la possibilité que l’accusé échappe à la compétence de la CPI, qu’il entrave ou compromette le déroulement du procès devant le tribunal, et que la sécurité des témoins et des victimes soit menacée.

En outre, Mme Massidda a indiqué que la libération de M. Lubanga pourrait causer des troubles à l’ordre public, en particulier dans la région de l’Ituri en RDC et aussi compromettre les enquêtes en cours et à venir du Bureau du Procureur (BdP) de la CPI. « Ces risques et dangers, pris ensemble, justifient sans aucun doute le maintien en détention de M. Thomas Lubanga, surtout étant donné le caractère temporaire de la décision de suspension du procès », a conclu Mme Massidda.

Selon le Bureau du Procureur, M. Lubanga était le chef de l’Union des patriotes congolais (UPC) groupe rebelle, dont les milices armées ont utilisé des enfants de moins de 15 ans dans des conflits interethniques dans la province de l’Ituri. M. Lubanga a démenti les accusations portant sur les crimes qu’il est présumé avoir commis en 2002 et 2003. Il a nié avoir eu sous son contrôle les milices armées de l’UPC et a affirmé qu’il a effectivement cherché à démobiliser les enfants soldats du groupe.

La défense de M. Lubanga a également affirmé que les intermédiaires du Bureau du Procureur ont soudoyé et coaché des témoins à charge, y compris toutes les personnes qui ont témoigné qu’ils étaient d’anciens enfants soldats de l’UPC. La question du rôle que des intermédiaires ont joué dans l’identification des témoins a été si cruciale que les juges ont ordonné que certains de ces intermédiaires prennent la barre des témoins.

En fait, c’est à la suite du refus du BdP de respecter l’ordre de divulguer l’identité de l’intermédiaire (désigné par le numéro 143 que lui a attribué la Cour), que les juges de première instance ont suspendu le procès. La défense avait dit qu’il lui fallait connaître l’identité de cet intermédiaire pour poursuivre l’interrogatoire d’un autre intermédiaire, qui subissait alors un contre-interrogatoire.