- Le procès de Lubanga devant la Cour pénale internationale - https://french.lubangatrial.org -

Déclaration au procès : Lubanga a dit à l’enfant soldat d’amener des femmes, des véhicules et des vaches

L’ancien chef rebelle congolais Thomas Lubanga a dit à des enfants soldats d’amener des femmes, des véhicules et des vaches et les a rassuré en leur affirmant que : « Tout appartient aux soldats », selon le témoignage entendu aujourd’hui lors de son procès à la Cour pénale internationale (CPI).

Un témoin qui a travaillé avec plusieurs anciens enfants soldats a fait cette déclaration aujourd’hui lors de son témoignage sur l’un des enfants qu’il a aidé à obtenir sa démobilisation de l’Union des patriotes congolais (UPC). Ce témoin, qui était un intermédiaire des enquêteurs de l’accusation en République démocratique du Congo, a aujourd’hui subi un contre-interrogatoire par l’avocat de la défense Marc Desalliers, qui lui a demandé d’expliquer les circonstances de sa première rencontre avec l’ancien enfant soldat qui a gardé l’anonymat.

Alors le témoin, dont le nom à la Cour est ‘l’intermédiaire 321’, a continué à raconter ce que lui avait dit le jeune combattant, autant qu’il s’en souvenait.

« L’enfant a poursuivi en disant qu’il a travaillé avec Thomas Lubanga pendant un certain temps et que Thomas Lubanga lui a dit que les soldats doivent tout posséder, c’est-à-dire les femmes, les véhicules, les vaches, que tout leur appartient », a dit le témoin. « Il [Lubanga] leur a aussi dit qu’après la guerre, ils auraient une vie meilleure. »

L’intermédiaire a indiqué que l’enfant lui a affirmé qu’il était l’un des soldats qui étaient les plus proches de M. Lubanga, et qu’il a été parmi les soldats qui gardaient un point de parachutage d’armes. L’intermédiaire a dit que l’enfant l’a ensuite emmené à cet endroit et lui a expliqué comment les avions larguaient des armes dans la zone.

À l’époque, l’intermédiaire travaillait avec une organisation non gouvernementale (ONG) qui  aidait les enfants soldats à quitter le service militaire et à se réunifier avec leur famille. La première rencontre entre l’enfant soldat et l’intermédiaire a eu lieu dans les bureaux de l’ONG, dont le nom n’a pas été révélé en audience publique.  

« Est-ce que l’enfant a quitté le service militaire de son propre chef ou est-ce que c’est son groupe qui l’a démobilisé » a demandé M. Desalliers.

Le témoin a répondu que l’enfant avait déserté du groupe armé de l’UPC après s’être rendu compte qu’il ne tirait aucun avantage de ce service mais plutôt subissait énormément de souffrances dans l’UPC. Il s’est donc échappé de l’UPC et s’est rendu au bureau de la Mission d’observation militaire de l’Organisation des Nations Unies au Congo (MONUC). Le personnel de la MONUC a ensuite amené l’enfant à l’agence où le témoin travaillait.

Le témoin a déclaré qu’après s’être s’est échappé de l’UPC, le garçon avait peur d’être tué et mangé par ses compagnons d’armes s’il était repris. « C’est ce que leur chef leur a dit. Il a dit que si quelqu’un désertait, il serait capturé, tué, grillé et mangé. »

L’intermédiaire a effectué la plus grande partie de sa déposition à huis clos, c’est pourquoi il n’était pas possible de savoir de quel enfant il parlait. Mais les juges au procès de Thomas Lubanga ont entendu un certain nombre de témoins de la défense dire que ‘l’intermédiaire 321’ a soudoyé et coaché des témoins pour leur faire dire qu’ils étaient des ex-enfants soldats de l’UPC. L’intermédiaire a nié avoir fait quoi que ce soit de mal.

M. Lubanga, le présumé ancien chef de l’UPC, est en procès à la CPI pour le recrutement, l’enrôlement et l’utilisation d’enfants soldats dans les conflits armés en République démocratique du Congo. Il a nié les charges dont, selon  les procureurs, il s’est rendu coupable en 2002 et 2003.

Juges ont ordonné à l’accusation de faire comparaître ‘l’intermédiaire 321’à la barre des témoins, après qu’un certain nombre de témoins de la défense l’aient impliqué dans divers actes de falsification de preuves. Entre autres choses, certains témoins ont affirmé que cet intermédiaire a soudoyé certains individus qui n’ont jamais été enfants soldats pour qu’ils mentent aux enquêteurs et se déclarent anciens membres de l’UPC. Certains de ces individus auraient alors comparu comme témoins à charge et prétendu qu’ils ont été enrôlés dans l’UPC.

Demain, la défense de M Lubanga doit poursuivre l’interrogatoire de l’intermédiaire.