- Le procès de Lubanga devant la Cour pénale internationale - https://french.lubangatrial.org -

Les avocats de la défense s’opposent à la comparution du ‘cousin de Lubanga’

Les avocats de Thomas Lubanga, un congolais accusé de crimes de guerre se sont aujourd’hui opposés à une demande présentée par les procureurs aux juges pour qu’ils appellent à la barre des témoins un homme censé être le cousin de l’accusé.

Il y a une semaine, les procureurs ont demandé aux juges de convoquer l’individu connu sous le nom ‘Cordo’, qui selon eux était un cousin de M. Lubanga, pour qu’il vienne témoigner sur son rôle présumé dans l’intimidation de témoins et l’incitation à faire un faux témoignage.

Au cours de l’audience d’aujourd’hui, l’avocat de la défense Jean-Marie Biju-Duval a énoncé les raisons pour lesquelles la défense était opposée à la requête du procureur. Il a déclaré que tandis que M. Lubanga avait le droit d’être jugé dans les plus brefs délais, « on a perdu beaucoup de temps et nous ne pouvons pas accepter qu’un nouveau délai soit demandé par l’accusation en vue d’organiser la comparution d’un certain individu. »

M. Lubanga est en détention à la Cour pénale internationale (CPI) depuis mars 2006. Son procès a commencé le Janvier 26, 2009. Selon les procureurs de la CPI, il a commis les crimes de guerre de recrutement, enrôlement et utilisation d’enfants soldats alors qu’il dirigeait l’Union des patriotes congolais (UPC) en 2002 et 2003.

« La demande du procureur est impossible à considérer car vous ne pouvez pas demander à la Chambre de citer un témoin dont l’identité est encore inconnue et dont le témoignage potentiel est également inconnu, » a affirmé M. Biju-Duval. Selon lui, il était de la responsabilité des procureurs d’enquêter, d’établir l’identité de Cordo, et ensuite d’avoir un entretien avec lui. « Si le témoin refuse de comparaître, ils peuvent alors demander à la Chambre de demander au témoin de comparaître », dit-il.

La défense a également soutenu que la demande de l’accusation était fondée sur une erreur de fait car Cordo n’avait jamais servi comme intermédiaire de la défense. En outre, la défense estimait que le témoignage Cordo ne serait d’aucune utilité.

« Le problème ici est de savoir si oui ou non les témoins de la défense ont menti », a déclaré M. Biju-Duval. « Je me demande si le témoignage de Cordo sera d’une quelconque utilité à la Chambre à ce sujet. »

Mais le procureur Manoj Sachdeva répliqué qu’il qu’il existait la preuve que Cordo a demandé à un témoin de l’accusation et deux témoins de la défense de mentir à la Cour. Il a ajouté qu’on avait dit à la Cour que Cordo avait un lien de parenté avec M. Lubanga. Si tel était le cas, a-t-il dit, alors la défense savait qui était Cordo.

M. Sachdeva a ajouté : « Il est possible que Cordo n’ait pas été un intermédiaire comme le suggère la défense, mais il a certainement travaillé pour la défense. Il a été utilisé pour faciliter les contacts entre les témoins potentiels et finalement avec des personnes ressources de la défense et leurs avocats ».

Le procureur a fait valoir que, puisque les juges ont ordonné que des intermédiaires de l’accusation qui avaient été accusés de falsification de preuve soient à la barre des témoins, le même principe devrait être exigé des intermédiaires de la défense, tels que Cordo.

Les juges n’ont pas rendu de décision sur la demande.

Entretemps, notons que le premier des intermédiaires de l’accusation va témoigner mercredi. Les procureurs ont aujourd’hui déclaré que, bien que ce témoin soit à La Haye, il était encore en train de lire la déclaration qu’il a faite au BdP. Certaines de ces déclarations ont été faites en 2009, d’autres pas plus tard que ce mois-ci.

La défense a demandé pourquoi l’intermédiaire avait besoin de plusieurs jours pour lire ses déclarations, dont certaines étaient récentes. Réponse de M. Sachdeva : « Bien sûr, il a récemment été interviewé, donc on peut espérer que sa mémoire est assez bonne pour qu’il participe à des entretiens. Cependant nous pensons que, pour répondre à des questions correctement et sincèrement devant la Cour, il a besoin de bien se familiariser avec ces déclarations. » 

Le juge président Adrian Fulford a critiqué l’idée que le témoin puisse éprouver le besoin de se rafraîchir la mémoire en ce qui concerne une entrevue qui a eu lieu quelques jours ou quelques semaines auparavant.

« Il nous semble tout le processus de familiarisation des témoins n’est pas vraiment destiné à remédier à une situation de ce genre où on a très récemment fait une déclaration », a déclaré le juge. « Mais étant donné que la question de l’auto-incrimination se pose avec ce témoin, c’est vraiment à contrecœur que nous allons accepter qu’en ces circonstances, il jette un regard sur les entretiens. »