Rapports quotidiens

15 Juin 2010

Procès Lubanga: ‘Le BdP n’a jamais promis de payer des témoins’

Par Wairagala Wakabi

Le procès de Thomas Lubanga a aujourd’hui entendu un membre du personnel du Bureau du Procureur (BdP) déclarer qu’on n’a jamais promis ou donné aux enfants qui ont témoigné à charge une incitation financière pour qu’ils fassent un témoignage incriminant.

Témoignant pour la deuxième journée, le témoin, qui travaille en République démocratique du Congo (RDC) et s’est occupé de certains des ex-enfants soldats qui ont témoigné pour l’accusation, a déclaré que les enfants et leurs tuteurs se sont portés volontaires pour collaborer avec le BdP.

Le témoin a raconté à la cour, présidée par le juge Adrian Fulford, qu’en tant que coordinateur de liaison sur le terrain, son rôle était de passer au crible les témoins potentiels et de les remettre aux enquêteurs qui ensuite les soumettaient à un interrogatoire détaillé. Il dit avoir aussi organisé le transport des enfants et leurs tuteurs et fourni un appui financier et logistique à des intermédiaires qui ont mis ces enfants en contact avec le personnel du BdP.

« Pendant le temps que vous étiez avec des enfants ou des adultes, leur avez-vous, à quelque moment que ce soit, prodigué des conseils ou des encouragements en ce qui concerne ce qu’ils devaient dire aux enquêteurs? » a demandé le procureur Nicole Samson.

Réponse du témoin : « Il ne s’est passé rien de ce genre … Il n’a pas été nécessaire de prodiguer des encouragements. »

Mme Samson a ensuite demandé au témoin s’il a promis aux enfants ou leurs parents quelque chose en échange de leur coopération avec les enquêteurs.

«Mon travail consistait à emmener les enfants rencontrer les enquêteurs et je me suis limité à [cela] … Donc, aucune promesse n’a faite aux parents ou aux enfants », a-il-répondu.

Mme Samson a ensuite demandé au témoin si les enfants ou les adultes lui avaient jamais dit qu’ils avaient l’intention de mentir aux enquêteurs. Il a déclaré que personne ne lui a jamais dit qu’il avait l’intention de mentir.

Cette personne témoigne sur injonction des juges, qui ont demandé que le BdP mette à disposition son personnel et certains de ses intermédiaires pour qu’ils répondent aux témoignages de la défense selon lesquels des intermédiaires ont coaché des témoins de l’accusation. Parmi les témoins qui auraient été coachés figuraient ceux qui ont affirmé qu’ils étaient d’anciens enfants soldats de l’Union des Patriotes Congolais (UPC).

M. Lubanga est jugé à la CPI pour conscription, enrôlement et utilisation d’enfants soldats dans un conflit armé alors que, selon l’accusation, il dirigeait l’UPC.

Selon le témoin d’aujourd’hui, les enquêteurs ne lui ont jamais indiqué quelles questions ils avaient l’intention de poser aux enfants qu’il leur présentait comme témoins potentiels. De même, a-t-il ajouté, les enfants n’ont jamais discuté avec lui de l’objet de leurs entretiens avec les enquêteurs. La plus grande partie de la déposition de ce témoin s’est effectuée à huis clos.

Au cours du contre-interrogatoire, l’avocat de la défense Catherine Mabille a demandé au témoin d’expliquer la différence entre la liste d’enfants qu’il a reçue du BdP et celle qui était en la possession d’un intermédiaire connu sous le nom de M. X.

«La liste présentée par M. X était un peu différente [mais] je ne peux pas dire qu’elle était radicalement différente. Il y avait un ou deux noms de plus que sur ma liste », a déclaré le témoin. Il a ajouté que dès qu’il a constaté cette anomalie, il en a informé ses supérieurs, et on lui a alors remis la liste définitive des enfants qu’il avait à interroger.

«Savez-vous si M. X, après modification de la liste, a contacté la personne à laquelle vous faites référence comme étant son supérieur? », a demandé à Mme Mabille.

Le témoin a répondu qu’il croyait que M. X et son supérieur hiérarchique ont été en contact après l’établissement de la liste définitive. Il a toutefois ajouté qu’il n’en était pas certain.

Le témoin a également déclaré que les enfants dont il s’est occupé ont passé quelques années dans un centre géré par M. X et son supérieur hiérarchique. Selon lui, la plupart des enfants n’avaient pas de papiers d’identité. La plupart d’entre eux ont déclaré que les documents ont été brûlés ou perdus pendant le conflit, a-t-il dit.

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