Résumé hebdomadaire

21 Mai 2010

La défense de Lubanga va interroger un enquêteur et deux témoins de la CPI

Par Wairagala Wakabi

Un enquêteur du Bureau du Procureur (BdP) à la Cour Pénale Internationale va témoigner dans le procès pour crimes de guerre de Thomas Lubanga, ancien dirigeant congolais.

Le président Adrian Fulford a révélé mercredi que l’enquêteur, dont le nom n’a pas été cité, et deux intermédiaires des enquêteurs de l’accusation de la CPI vont témoigner au procès. Les trois témoins ont été cités à comparaître par la défense de M. Lubanga

A l’audience de cette semaine, il est apparu qu’outre un témoin de la défense qui doit faire sa déposition la semaine prochaine, la cour entendra l’enquêteur et les deux intermédiaires, ensuite la défense demandera aux juges d’arrêter les poursuites pour vice de procédure.

M. Lubanga est accusé des crimes guerre de conscription, enrôlement et utilisation d’enfants de moins de quinze ans dans un conflit armé en République Démocratique du Congo. Les procureurs de la CPI l’accusent d’avoir commis ces crimes au cours des années 2002 et 2003 pendant qu’il dirigeait l’Union des Patriotes Congolais (UPC).

La défense de M. Lubanga a accusé les intermédiaires des enquêteurs du BdP de corrompre et de coacher des témoins. La défense a aussi déclaré que tous les témoins qui, devant la cour, ont prétendu être d’anciens enfants soldats dans l’UPC, n’ont en fait jamais fait partie du groupe.

Du fait de ce vice de procédure dans la collecte des preuves contre M. Lubanga, la défense a, en janvier, déclaré qu’après avoir présenté un témoin qui allait faire une déposition sur la manière dont les preuves auraient été falsifiées, elle allait demander aux juges de prononcer un non-lieu.

Entretemps, un ancien enfant soldat qui a témoigné au procès mardi, a déclaré qu’il était peu disposé à quitter la milice de l’Union des patriotes congolais (UPC), même quand un travailleur humanitaire lui a à maintes reprises promis un soutien financier s’il abandonnait le service militaire.

 Le ‘Témoin 297 ‘, dont la déposition s’est étalée sur trois jours, a déclaré qu’il ne voulait pas quitter la milice car la vie de soldat lui procurait une certaine sécurité financière.

Il a dit à la cour que les soldats de l’UPC avaient l’habitude d’extorquer de l’argent aux civils à des barrages routiers. Parfois, les soldats étaient envoyés par leurs commandants pour prendre de l’argent aux civils, mais ils ne remettaient jamais la totalité de leurs rapines à leurs supérieurs. D’autres fois, les soldats sortaient la nuit de leur propre initiative et pour aller extorquer de l’argent aux civils, a-t-il ajouté.

Le ‘Témoin 297 ‘  a rappelé que pendant même qu’il était enfant soldat de l’UPC, il a tenu plusieurs réunions avec un travailleur humanitaire désigné sous le nom de M. Mbusa. Le témoin a déclaré qu’à plusieurs reprises il a reçu du savon et des vêtements de M. Mbusa, et que, pendant ces réunions, le travailleur humanitaire lui a toujours conseillé de quitter le service militaire.

Il a indiqué qu’à cette époque, M. Mbusa travaillait au Fond de l’ONU pour les Enfants (UNICEF) et qu’il distribuait des vivres et autres articles de secours aux personnes déplacées dans la province de l’Ituri déchirée par la guerre.

Des enquêteurs du Bureau du Procureur (BdP) étaient présents à certaines de ces réunions que le témoin a tenues avec M. Mbusa, a dit le témoin.  

«Ils m’ont dit de quitter le service militaire et ils allaient m’aider si je quittais le service militaire», a déclaré le ‘Témoin 297 ‘, parlant de ses discussions avec les enquêteurs de l’accusation de la CPI lors des premières réunions qu’il a tenues avec ces derniers. Selon le témoin on lui a dit qu’il recevrait une assistance financière en vue d’une formation de chauffeur ou de mécanicien.

Le ‘Témoin 297’ a raconté à la cour qu’il a été enlevé de son école par des soldats conduits par Floribert Kisembo et enrôlé de force dans les Forces Patriotiques de Libération du Congo (FPLC), la branche armée de l’UPC.

Il a déclaré qu’il a servi comme garde du corps de M. Kisembo, l’homme qui selon les procureurs de la CPI était le chef d’état major de la milice. Il a fini par déserter. 

Le ‘Témoin 297 ‘  figurait sur la liste des témoins à charge, mais pour raison de santé il n’a pas été en mesure de témoigner en avril dernier, comme cela avait été prévu. L’accusation a conclu sa plaidoirie en juillet dernier, mais elle a exprimé son intérêt à entendre les preuves incriminantes qui sont en possession de ce témoin.

Cependant, lorsque le ‘Témoin 297’ a comparu à la barre, les procureurs l’ont aussi interrogé sur le rôle qu’aurait joué un intermédiaire du BdP dans la falsification de preuves contre M. Lubanga. 

En fait, à cause des déclarations du ‘Témoin 297’ concernant cet intermédiaire, c’est la défense qui a récemment demandé aux juges d’inviter ce témoin à comparaître à la barre. La défense soutient que la plus grande partie de son témoignage correspond à ses propres observations concernant le coaching présumé des témoins et la falsification des preuves par les intermédiaires.

Lundi, le ‘Témoin 297’ a déclaré qu’il a suivi une formation dans trois camps de l’UPC, a été affecté et a combattu dans plusieurs régions, mais n’a jamais vu M. Lubanga dans aucun de ces endroits.

Mercredi, M. Biju-Duval a fait remarquer au témoin que dans sa déposition au BdP en 2007, il n’a jamais fait mention de l’endroit où les soldats de l’UPC l’ont enlevé, mais que devant la cour il a déclaré qu’il avait été enlevé à l’école de Katoto.

Le témoin a déclaré qu’il ne se souvenait pas de ce qu’il avait dit aux enquêteurs du BdP sur la question, mais qu’il était sûr que c’est à l’école de Katoto qu’il a été enlevé.

Biju-Duval a également demandé au ‘Témoin 297’d’expliquer pourquoi au cours de son entretien avec la défense de M. Lubanga en décembre dernier il a déclaré que les soldats qui l’ont enlevé l’ont emmené à Aru, alors que devant la cour il a affirmé qu’ils l’ont emmené à Nizi.

« Lorsque j’en ai parlé avec vous, j’avais oublié le nom des villes ou villages. Si j’ai dit Aru, c’est probablement parce que ma mémoire ne fonctionnait pas bien et je l’avais oublié », a répondu le témoin.

Il a ajouté que lorsqu’il a rencontré les avocats de la défense, il n’avait pas été informé qu’ils allaient avoir un entretien avec lui. « Je ne savais pas si vous étiez venus pour m’arrêter. J’avais peur. »

La défense poursuit le contre-interrogatoire du ‘Témoin 297’ lundi, 24 mai 2010.

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