- Le procès de Lubanga devant la Cour pénale internationale - https://french.lubangatrial.org -

Deux anciens soldats de l’UPC témoignent et sont interrogés par les avocats des victimes

Le procès de Lubanga a repris mercredi après une interruption de trois semaines, avec l’appel à la barre par la défense de deux  témoins, qui ont tous les deux déclaré être des anciens soldats de l’Union des Patriotes Congolais (UPC), groupe qui selon les procureurs de la Cour Pénale Internationale était dirigé par Thomas Lubanga.

Selon la défense, le témoignage des deux témoins était destiné à jeter le discrédit sur les preuves fournies par l’une des trois victimes qui ont témoigné en janvier passé. Les témoins allaient notamment témoigner que la victime a menti à la cour en ce qui concerne son identité

Dieudonné Tonyfwa Urochi, qui a déclaré être né en 1988, et Jean Paul Bejijjo Chonga, qui a dit être né en mai 1987, ont témoigné séparément par lien vidéo à partir de Bunia dans l’est du Congo. Ils ont témoigné à visage découvert sur les écrans à la cour de La Haye, mais une partie de leur déposition a été faite à huis clos. Il n’était donc pas possible de savoir à partir du témoignage en audience publique ce qu’ils ont déclaré au sujet de la victime participante qui aurait menti à la cour en ce qui concerne son identité.

Joseph Keta, avocat des victimes, a longuement interrogé les deux témoins et une personne qu’elles ont déclaré être leur condisciple, sur les établissements scolaires qu’ils ont fréquentés. Il est présumé que ce condisciple est la victime qui a témoigné en janvier cette année. Les témoins ont également parlé de leur voyage à Kinshasa, la capitale congolaise, avec leur ancien condisciple mais n’ont pas révélé la teneur de leur mission dans la capitale en audience publique.

A la reprise du procès, le président Adrian Fulford avait souligné que les représentants légaux des victimes avaient fait valoir qu’ils avaient un intérêt personnel dans les deux témoins à décharge, et avaient été autorisés à les interroger. En février de cette année, la défense a contesté le droit des représentants légaux à interroger les témoins de la défense, mais son argument a été rejeté par les juges.

Les procureurs Olivia Struyven et Nicole Samson ont demandé  aux deux témoins comment ils sont entrés à l’UPC et comment ils sont devenus des témoins pour M. Lubanga. Le jeudi,  Mme Samson a interrogé M. Urochi au sujet d’une personne nommée Dieudonné, un enquêteur pour la défense de M. Lubanga basé au Congo. Le témoin a indiqué que la première fois qu’il a rencontré Dieudonné c’était au début de l’année et qu’il l’a ensuite rencontré avec quelques-uns des avocats de M. Lubanga. M. Urochi a déclaré à la cour qu’à leur première rencontre, il a dit à Dieudonné qu’il n’était pas un ancien enfant soldat de l’UPC.

 “Vous avez déclaré à la cour que vous aviez effectué le service militaire dans l’UPC. Pourquoi avez-vous dit à Dieudonné que vous n’aviez pas effectué le service militaire dans l’UPC?” a demandé Mme Samson.

 “J’ai refusé de lui dire la vérité, et c’était parce que je ne savais pas pourquoi il me posait cette question,” a répondu le témoin.

Au cours de rencontres que M. Urochi a plus tard eues avec les avocats de M. Lubanga et Dieudonné, il leur a confirmé avoir combattu dans l’UPC.

M. Lubanga est jugé pour conscription, enrôlement et utilisation d’enfant de moins de quinze ans dans un conflit armé au cours des années 2002 et 2003. Il a rejeté toutes les accusations.

Mme Samson a demandé à M. Urochi si, à cette rencontre, il avait révélé qu’il avait demandé à participer au procès de M. Lubanga en tant que victime. “Avez-vous jamais dit à Dieudonné ou à une quelconque autre personne que vous avez rempli le formulaire de demande du statut de victime?” a demandé Mme Samson.

M. Urochi a répondu qu’il avait montré des exemplaires du formulaire à Dieudonné et aux avocats. Mais il a ajouté qu’il ne leur a pas dit qu’il avait été remplacé comme victime. Il n’a pas été indiqué en audience publique comment M. Urochi a perdu son statut de victime participant au procès et est plutôt devenu témoin à décharge.

A la question de savoir comment ils sont entrés à l’UPC, M. Urochi a dit qu’il avait été kidnappé par les soldats de l’UPC et enrôlé dans la milice. Mais M. Chonga a indiqué qu’il a quitté l’école en 2001 et est entré au groupe où son oncle occupait un grade élevé.

« Je suis allé voir mon oncle paternel, et c’est en ce moment-là que je suis allé effectuer mon service militaire. J’ai vraiment aimé le service militaire car dans notre village les soldats nous fatiguaient et nous harcelaient beaucoup. » Il ajoute : « Je suis allé chez mon oncle à cause des menaces des soldats, et je suis immédiatement entré à l’UPC. »

Mme Struyven a demandé à M. Chonga quels soldats harcelaient les gens. Il a répondu que les soldats de l’UPC violaient les femmes et les jeunes filles et se livraient au pillage. Il a ajouté que les soldats du Front Nationaliste et Intégrationniste Front (FNI) – groupe local rival de l’UPC – tuaient et frappaient les civils.

Le procès continue lundi avec la poursuite du contre-interrogatoire de M. Chonga.