Rapports quotidiens

29 April 2010

L’avocat des victimes conteste deux nouveaux témoins de Lubanga

Par Wairagala Wakabi

Les avocats des victimes participant au procès pour crimes de guerre de l’ancien dirigeant rebelle congolais Thomas Lubanga ont aujourd’hui contesté deux témoins de la défense qui  ont témoigné par lien vidéo à partir de la République Démocratique du Congo (RDC).

Selon la défense, le témoignage des deux témoins était destiné à jeter le discrédit sur les preuves fournies par l’une des trois victimes qui ont témoigné en janvier passé. Les témoins allaient notamment témoigner que la victime a menti à la cour en ce qui concerne son identité.

A la reprise du procès, le président Adrian Fulford avait souligné que les représentants légaux des victimes avaient fait valoir qu’ils avaient un intérêt personnel dans les deux témoins à décharge, et avaient été autorisés à les interroger. En février de cette année, la défense a contesté le droit des représentants légaux à interroger les témoins de la défense, mais son argument a été rejeté par les juges.

Dans leurs dépositions, faites séparément, les deux témoins ont indiqué à la cour qu’ils ont combattu dans les rangs de l’Union des Patriotes Congolais (UPC), groupe qui selon les procureurs de la Cour Pénale Internationale (CPI) était dirigé par M. Lubanga. M. Dieudonné Tonyfwa Urochi, qui a témoigné le premier, a indiqué qu’il était né en 1988, ce qui signifie qu’il était âgé de quatorze ans au moment où il était à l’UPC. Pour sa part, Jean Claude Chonga a affirmé à la cour qu’il était né en mai 1987, ce qui signifie qu’il avait à peu près quatorze ans lors qu’il est entré à l’UPC en 2001

Dans le contre-interrogatoire du procureur Olivia Struyven, M. Chonga a aujourd’hui indiqué qu’il a quitté l’école en 2001 et est entré au groupe où son oncle occupait un grade élevé.

« Je suis allé voir mon oncle paternel, et c’est en ce moment-là que je suis allé effectuer mon service militaire. J’ai vraiment aimé le service militaire car dans notre village les soldats nous fatiguaient et nous harcelaient beaucoup. » Il ajoute : « Je suis allé chez mon oncle à cause des menaces des soldats, et je suis immédiatement entré à l’UPC. »

M. Lubanga est jugé pour conscription, enrôlement et utilisation d’enfant de moins de quinze ans dans un conflit armé au cours des années 2002 et 2003. Il a rejeté toutes les accusations.

Joseph Keta, avocat des victimes, a longuement interrogé les deux témoins et une personne qu’elles ont déclaré être leur condisciple, sur les établissements scolaires qu’ils ont fréquentés. Il est présumé que ce condisciple est la victime qui a témoigné en janvier cette année. Les témoins ont également parlé de leur voyage à Kinshasa, la capitale congolaise, avec leur ancien condisciple mais n’ont pas révélé la teneur de leur mission dans la capitale en audience publique.

Bien qu’ils aient fait leur déposition à partir de Bunia dans l’est du Congo, M. Urochi et M. Chonga ont tous les deux témoigné à visage découvert sur les écrans à la cour de La Haye.  A côté d’eux, au Congo, était assis un employé du tribunal qui leur prêtait assistance. Une partie de leur déposition a été faite à huis clos.

Mme Struyven a demandé à M. Chonga quels soldats harcelaient les gens. Il a répondu que les soldats de l’UPC violaient les femmes et les jeunes filles et se livraient au pillage. Il a ajouté que les soldats du Front Nationaliste et Intégrationniste Front (FNI) – groupe local rival de l’UPC – tuaient et frappaient les civils.

Lors que le procureur a demandé au témoin s’il connaissait des cas où les soldats de l’UPC ont violé des jeunes filles et que ce dernier a répondu qu’il en connaissait un, le juge Fulford est alors intervenu, et s’est demandé quel rapport cette information avait avec les accusations qui pesaient sur M. Lubanga.

Mme Struyven a répondu que cette information corroborait les preuves fournies par un ancien témoin, le ‘Témoin 270’, et mettait en lumière la vie au jour le jour des enfants soldats de l’UPC. Le juge Fulford a exprimé son désaccord, affirmant que l’accusation avait décidé de ne pas inclure dans les charges qui pèsent sur M. Lubanga celles qui touchent à sa responsabilité pénale pour ce qui est du viol présumé de jeunes femmes par les soldats de l’UPC. Il a demandé au procureur de ne pas s’occuper de cette question.

Le procureur a alors demandé au témoin d’indiquer quel était l’âge des enfants qui se trouvaient au camp de l’UPC où il était. “Certains des enfants étaient plus jeunes que moi” a répondu M. Chonga.

« Etait-ce des garçons ou des filles? » a demandé Mme Struyven.

« Des garçons » a répondu Mme Chonga. « Lors que les filles allaient effectuer leur service militaire, elles étaient immédiatement mariées. Seul un petit nombre d’entre elles finissaient la formation. »

M. Chonga poursuivra sa déposition lundi.

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