Aujourd’hui, la défense de Thomas Lubanga a appelé son troisième témoin qui a indiqué que bien qu’ayant jamais appartenu à des forces armées, il avait, ainsi que d’autres garçons qui n’avaient également jamais servi dans aucune milice, été présenté en tant qu’ex-enfant soldat devant des personnes non identifiées.
Le témoin, Claude Nyéki Django, a déclaré qu’un homme connu sous le nom de Dudu l’avait emmené, avec d’autres garçons, à une réunion dans la ville congolaise de Beni où il a été prétendu qu’ils étaient des ex-combattants. Lors des courts moments où il a témoigné en séance publique, Django n’a pas précisé quel était l’objectif de cette réunion.
II Il s’est toutefois souvenu que, accompagné du fils de Dudu et de « nombreux »autres garçons qui avaient rencontré les personnes anonymes à Beni, ils avaient été transférés de l’est du Congo dans une maison de la capitale Kinshasa, où ils avaient été tenus enfermés pendant plusieurs mois.
Django, qui a dit avoir 20 ans, a témoigné à visage découvert et sans déformation numérique de la voix. La plupart des témoins de l’accusation ont témoigné avec le visage et la voix numériquement déformés afin de les protéger d’éventuelles représailles. Mais la défense a souligné que des mesures de protection si étendues offraient une couverture aux témoins qui avaient l’intention de mentir délibérément devant la Cour.
Bien que Django n’ait pas bénéficié de mesures de protection, il a témoigné en séance publique pendant un peu moins d’une heure puis a donné le reste de sa déposition à huis clos. Il n’a pas été par conséquent possible de savoir quel rôle, le cas échéant, il avait joué avec les autres garçons dans le procès Lubanga.
Les deux témoins de la défense qui avaient précédé Django ont raconté comment les intermédiaires du Bureau du Procureur (BdP) avaient acheté les parents des jeunes garçons afin de fabriquer des témoignages prouvant qu’ils étaient des ex-enfants soldats. Un de ces garçons a comparu en tant que témoin de l’accusation au procès Lubanga et a prétendu être un ex-enfant soldat de l’Union des patriotes congolais (UPC), aux dires du deuxième témoin de la défense qui serait le père de ce témoin.
Lubanga, que la Cour pénale internationale (CPI) allègue avoir été le chef de l’UPC et le commandant en chef de son bras armé, est poursuivi pour les crimes de guerre d’enrôlement, de conscription et d’utilisation d’enfants soldats. Il est accusé d’avoir commis ces crimes en 2002 et 2003.
L’avocat de la défense Marc Desalliers a interrogé aujourd’hui Django à propos de la réunion de Beni.
Desalliers : « Dudu savait-il que vous n’aviez jamais servi en tant qu’enfant soldat ? ».
Django : « Il le savait très bien ».
Desalliers : « Pouvez-vous nous dire ce que Dudu a dit aux personnes que vous avez rencontrées à Beni par rapport à ce fait ? ».
Django : « Dudu n’a pas dit personnellement que je n’avais pas été enfant soldat. Pourquoi ne l’a-t-il pas fait ? Il attendait que ce soit moi qui m’en charge. Il m’a simplement dit ce que je devais déclarer et m’a dit d’accepter l’idée que j’avais servi en tant qu’enfant soldat ».
Django a déclaré avoir voulu dire aux gens présents lors de cette réunion qu’il n’avait pas été soldat. Mais lorsqu’il a tenté de s’exprimer, l’un des hommes lui a demandé de se tenir tranquille.
Les contacts de Dudu ont ensuite emmené les garçons à Kinshasa en leur promettant de leur offrir une formation professionnelle. Au lieu de cela, ils ont été tenus enfermés dans une maison pendant des mois. « Nous dormions toute la journée et la nuit nous dormions également… nous restions enfermés, nous ne pouvions même pas bouger ».
Le témoignage de Django s’est ensuite déroulé à huis clos, il n’a donc pas été possible de connaître ce qui s’était ensuite passé dans la maison pour lui-même et les autres garçons. Son témoignage doit se poursuivre.
