- Le procès de Lubanga devant la Cour pénale internationale - https://french.lubangatrial.org -

Les avocats de Lubanga demanderont aux juges l’abandon des poursuites

La présentation des éléments de la défense de Lubanga a débuté cette semaine, ses avocats ayant déclaré que les témoins de l’accusation avaient été coachés et que ceux qui avaient prétendus avoir été enfants soldats ne l’avaient en réalité jamais été.

Mercredi, Catherine Mabille, l’avocate principale de la défense a indiqué que les avocats demanderaient aux juges d’abandonner les poursuites après la présentation de leurs 16 témoins qui démontreront, entre autres, que tous les témoins cités par l’accusation en tant qu’enfants soldats étaient des faux témoins.

Elle a précisé que les témoins, et dans certains cas leurs parents, avaient délibérément menti à la Cour et que des agents du Bureau du Procureur les avaient aidé à fabriquer leurs témoignages.

« La défense a l’intention de prouver que six d’entre eux n’ont jamais été enfant soldat, que le septième a menti sur son âge et sur les conditions dans lesquelles il a été enrôlé et que le huitième n’a jamais appartenu à l’UPC », a-t-elle indiqué.

Lubanga, que la Cour pénale internationale (CPI) allègue avoir été le fondateur de l’UPC, est accusé de la conscription, de l’enrôlement et de l’utilisation d’enfants soldats lors de conflits armés s’étant déroulés en 2002 et 2003. La Cour pénale internationale accuse également Lubanga d’avoir été le commandant en chef des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC) qui a utilisé des enfants soldats dans des combats interethniques ayant eu lieu en République démocratique du Congo.

La défense a déclaré qu’il n’était pas possible de garantir un procès équitable lorsqu’une partie importante de celui-ci était fondée sur des témoignages fabriqués. « Comment les juges peuvent-ils jouer leur rôle, à savoir chercher et établir la vérité, si le témoignage qu’ils ont entendu résultent d’efforts concertés destinés à les duper ? », s’est interrogée Mabille.

Le premier témoin à comparaître pour la défense a indiqué aujourd’hui à la Cour que bien que son fils n’ait jamais servi dans aucun groupe militaire, une organisation qui avait promis un travail au garçon a tenté ensuite de le faire passer pour un enfant soldat.

Le témoin a précisé que l’organisation anonyme a également trompé la mère et l’oncle de l’enfant en leur faisant croire qu’elle offrirait une bourse d’étude au garçon, ajoutant que cette organisation semblait disposer de bureaux dans une ville du nord-est du Congo, Beni, et dans la capitale, Kinshasa.

Le témoignage, qui s’est déroulé pour l’essentiel à huis clos, n’a pas clairement indiqué si le fils du premier témoin de la défense a comparu en tant que témoin de l’accusation et a prétendu avoir servi en tant qu’enfant soldat.

Plus tôt dans la journée de mercredi, lorsque le témoin avait débuté son témoignage, il avait déclaré qu’en 2002 et 2003, il était demeuré chez lui avec son fils et, qu’à aucun moment, ce dernier n’avait servi dans un groupe militaire.

Il a précisé qu’en 2007 son fils désobéissant s’était enfui de la maison et était demeuré avec une tante. Ce fut à ce moment-là qu’il rencontra le personnel d’une organisation anonyme qui a ensuite prétendu qu’il avait été enfant soldat.

Lorsque le procureur Manor Sachdeva a interrogé le témoin sur le nom de l’organisation, l’avocat de la défense Marc Desalliers a protesté.

« Le témoin vient d’indiquer qu’il ne connaissait pas le nom de l’organisation et mon éminent confrère lui demandé immédiatement après s’il connait le nom de l’organisation. Je proteste une nouvelle fois contre le fait qu’il ignore les réponses données par le témoin ».

Le juge Adrian Fulford a donc rappelé au procureur que le témoin avait déjà indiqué qu’il ne connaissait ni le nom de l’organisation ni celui des employés qui avaient emmené son fils.

Desalliers avait fait précédemment une même objection lorsque Sachdeva avait demandé à plusieurs reprises au témoin s’il n’avait vraiment pas revu son fils depuis que ce dernier avait quitté la maison en 2007.

Le témoin, afin de protéger son identité, a témoigné sans être visible du public, sa voix et son visage étant numériquement déformés lors de la transmission des séances de la Cour. Les avocats de la défense ont déclaré à l’ouverture de l’audience qu’ils pensaient que le témoin déposerait en public mais que ce dernier avait ensuite indiqué vouloir bénéficier de mesures de protection pour des raisons de sécurité. Le témoin poursuivra son témoignage lundi prochain.

La défense a indiqué que ses preuves démontreront que les témoins de l’accusation ont été encouragés à mentir sur un certain nombre de points très spécifiques et en particulier sur leurs noms, le nom de leurs parents et celui de leurs écoles.

« Cela a été fait pour qu’il soit plus difficile de vérifier les informations les concernant. Ils ont été encouragés à mentir sur leur âge et sur le fait qu’ils auraient appartenu à un groupe armé de façon à qualifier les charges contre M. Lubanga », a indiqué Mabille.

Mabille a déclaré que les avocats de la défense ne tenteraient pas de prouver qu’il n’y avait pas de mineurs présents dans les rangs des FPLC. Mais ils tenteront de démontrer que Lubanga n’a pas participé au recrutement d’enfants soldats et, qu’au contraire, il a rencontré de grandes difficultés pour démobiliser les jeunes combattants qui appartenaient aux FPLC.

« Les témoins de la défense présenteront des preuves prouvant que le chef politique Thomas Lubanga n’a joué aucun rôle actif dans la création des forces militaires de l’UPC et qu’il n’a participé en aucune manière à un plan commun de recrutement de mineurs », a indiqué Mabille.