Rapports quotidiens

31 Mars 2009

La dure vie des enfants soldats

Par Meribeth Deen

Mardi, un témoin a déclaré devant la Cour pénale internationale que les enfants soldats de la milice de Thomas Lubanga étaient placés dans une unité spéciale dénommée kadogo et qu’ils étaient aux prises avec la faim et les coups.

Le témoin, un ex-enfant soldat, a indiqué avoir fui les affrontements de Bunia, chef-lieu de l’Ituri, avec deux autres personnes qu’il supposait être également des enfants soldats.

Il a précisé que les enfants soldats étaient peu nourris et mal équipés et qu’il se souvenait de la fois où une bombe était tombée près d’eux, provoquant leur fuite. Mais l’un d’entre eux avait trébuché et perdu ses bottes trop grandes.

Après être parvenu à rejoindre un important camp de l’Union des patriotes congolais (UPC), le chef d’état-major de la milice, Floribert Kisembo, avait placé ses deux compagnons dans une unité kadogo, un terme swahili pour désigner un enfant soldat.

Le témoin a déclaré que l’unité avait été mise en place à cause des conditions difficiles et parce que les enfants nécessitaient une protection spéciale. Mais, au contraire, les membres de l’unité kadogo étaient traités encore plus rudement que les autres combattants de la milice.

« Il pleuvait constamment », a-t-il indiqué. « Il n’y avait ni nourriture ni médicaments et il leur était difficile de se laver. Ils avaient une santé médiocre qui allait se dégradant. Le chef d’état-major leur avait précisé qu’il prendrait soin d’eux. Ils étaient vulnérables ».

Il a expliqué qu’une unité kadogo comptait 40 personnes environ mais qu’elle n’exerçait pas de fonction spécifique hormis chanter des chants militaires, des chansons sombres ainsi que des chants de victoire et de louange.

« Nous chantions tout le temps », a déclaré le témoin. « Il s’agissait d’un remède à la pression que nous subissions, c’était le seul moyen de soulager nos souffrances ».

Lorsque le procureur Manoj Sachdeva a demandé si les kadogos étaient punis, le témoin a répondu que la discipline faisait partie de la vie de l’UPC et que les soldats étaient souvent fouettés ou mis en prison. Les enfants étaient également fouettés pour cause de désobéissance.

« Je me souviens avoir vu une fois des kadogos se faire fouetter », a-t-il déclaré à la Cour.   « Il était très facile d’être démoralisé et les drogues étaient partout présentes.  Quelqu’un m’a dit que lorsque les kadogos fumaient du cannabis, ils devenaient incontrôlables et menaçaient même de tuer des gens. Ces kadogos étaient alors forcés de s’allonger par terre pour être fouettés avec des cordes.

Il a précisé que les mêmes sanctions étaient appliquées lorsque des kadogos tentaient de s’enfuir. Les kadogos étaient parfois autorisés à aller chercher de la nourriture dans les villes voisines mais la plupart du temps ils devaient rester au camp, « même si la nourriture manquait ».

« Tous les adultes partaient chasser ou voler de la nourriture », a-t-il déclaré, « mais (les kadogos) n’en avaient pas le droit. Je continue de penser qu’avec de tels manques, un enfant ne peut que devenir terriblement affamé.

Le procès se poursuivra demain.

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