Rapports quotidiens

3 Mars 2009

L’ex-enfant soldat : “Tuer ou être tué”

Par Wairagala Wakabi

Mardi, un ex-enfant soldat a raconté comment, en tant que combattant de la milice de Thomas Lubanga, il avait tiré sur des gens dans des affrontements, expliquant à la Cour qu’il avait dû tuer pour ne pas être tué.

L’ex-soldat a déclaré avoir été pris de vertiges la première fois qu’il avait tué un combattant ennemi et qu’il était hanté par les souvenirs du temps où il avait été enfant soldat dans la milice de l’Union des patriotes congolais (UPC) de Lubanga.

« Si vous ne tiriez pas sur l’ennemi, il pouvait vous tirer dessus et vous tuer et c’est ce qui donnait la force de continuer », a-t-il indiqué à la Cour lors de la description de son premier combat dans un endroit dénommé Barrière.

Continuant son témoignage de la semaine précédente, le témoin, qui avait reçu le pseudonyme de Patrick de la part des procureurs de la Cour, a déclaré que des enfants soldats étaient présents parmi ceux qui avaient tué et blessé dans les batailles de Barrière et de Lipri.

Lorsque la défense lui a demandé son sentiment sur la première fois où il avait tué quelqu’un, Patrick a répondu : « Tuer quelqu’un est une mauvaise chose ».

« Lorsque j’ai tiré et que j’ai vu que j’avais touché quelqu’un qui est ensuite tombé, j’ai été pris de vertiges. J’ai ensuite repris connaissance. Je me suis dit que si je m’enfuyais, je serais en danger, aussi j’ai dû continuer. Mais cela m’a perturbé, mon cerveau ne fonctionnait pas correctement ».

Patrick a précisé qu’il était tourmenté par son passé d’enfant soldat.

Faire partie de l’UPC m’a laissé de mauvais souvenirs et cela a provoqué un grave retard de développement dans mon existence », a-t-il expliqué à la Cour.

« Je suis en retard dans ma scolarité. La classe de l’école que je fréquente actuellement ne correspond pas à mon âge. J’ai aussi l’impression que ma tête ne fonctionne pas comme elle le devrait ».

Patrick a indiqué qu’il s’était enrôlé dans l’armée de Lubanga en 2002 mais qu’il avait ensuite déserté après avoir participé à quatre affrontements.

Bien que les filles présentes dans le camp militaire avaient également reçu un entraînement militaire, elles ne semblaient pas prendre part au combat. Il a indiqué qu’elles cuisinaient et couchaient avec les commandants.

Patrick a précisé que le rôle du soldat était de « chasser l’ennemi ».

Lorsque le procureur Julieta Solano McCausland lui a demandé quel était cet ennemi, Patrick a rétorqué qu’on lui avait dit qu’il s’agissait de l’ethnie Lendu. La milice de Lubanga a été accusée d’avoir tué des civils appartenant aux groupes ethniques Lendu et Ngiti.

Entre-temps, l’Accusation a subi un sérieux revers lorsque le procureur Nicole Samson a annoncé que deux des témoins n’étaient plus intéressés par une déposition pour des raisons de sécurité.

L’accusation a également expliqué qu’elle annulait la déposition de deux autres témoins car des témoins précédents avaient déjà abordé les questions sur lesquelles ces deux témoins supplémentaires devaient témoigner.

Le juge président Adrian Fulford a demandé aux procureurs de s’assurer que la Défense ait accès à ces témoins car celle-ci avait escompté que leurs témoignages feraient partie intégrante du procès.

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