Rapports quotidiens

28 Janvier 2009

Un témoin affirme avoir menti et que ses déclarations étaient préparées

Par Rachel Irwin

Les procureurs du procès de Thomas Lubanga ont subi un sérieux revers aujourd’hui ; en effet, leur premier témoin a soudainement fait volte-face, affirmant avoir menti et que ses déclarations étaient préparées.

Le témoin anonyme avait dans un premier temps indiqué à la Cour pénale internationale avoir été kidnappé par des miliciens aux ordres de Lubanga alors qu’il rentrait de l’école avant d’être emmené dans un camp d’entraînement pour enfants soldats.

Toutefois, lorsque le procureur adjoint de la CPI, Mme Fatou Bensouda, a demandé au témoin s’il avait effectivement été dans un camp d’entraînement, celui-ci a hésité.

« Il m’est difficile de répondre car j’ai prêté serment [au tribunal] », a-t-il déclaré.

Si le jeune homme était protégé des regards de la tribune du public, son visage et sa voix étant déformés, les personnes présentes au tribunal, dont Lubanga, pouvaient néanmoins le voir.

Après l’aveu du jeune homme, l’audience a été suspendue afin de lui permettre de consulter un avocat représentant les victimes dans cette affaire. À la reprise, Bensouda l’a une nouvelle fois interrogé à propos du camp d’entraînement.

S’adressant à la Cour, ce dernier a déclaré : « ce que j’ai dit auparavant, ce n’est pas ce que je voulais dire ». Le témoin a alors laissé entendre qu’un groupe d’aide humanitaire lui avait indiqué les propos à tenir.

« Je ne vous demande pas ce que le (groupe d’aide) vous a dit », a répondu Bensouda. « Avez-vous pris part au camp d’entraînement ? »

« Non », a rétorqué le témoin.

Adrian Fulford, le juge président, a invité le témoin à confirmer si sa déposition était exacte.

« Ce n’est pas la vérité », a-t-il répondu.

Le revirement de la déposition du jeune homme complique la tâche des procureurs de la CPI qui espèrent démontrer que Lubanga a enrôlé, entraîné et utilisé de jeunes garçons dans les combats qui ont fait rage en 2002 et 2003 dans la région de l’Ituri (République démocratique du Congo). D’autres ex-enfants soldats devraient toutefois monter à la barre.

Après une nouvelle suspension, Bensouda a indiqué à la Cour qu’elle craignait pour la sécurité du témoin, en particulier s’il devait retourner en Ituri. Selon elle, c’est par crainte pour sa sécurité personnelle que le témoin a changé sa déposition.

Le juge Fulford a pris acte du fait que le témoin a revu sa déposition après avoir été conseillé sur le déroulement du procès et l’auto-incrimination.

Le témoin ne sera pas poursuivi pour les infractions commises en tant qu’enfant soldat, mais Fulford s’est toutefois demandé si le témoin était passible de « charges criminelles ou quasi-criminelles » à son retour en RDC.

Laurence Blairon, porte-parole de la CPI, a signalé que les juges de la CPI rencontreront les avocats de la Défense, de l’Accusation et des victimes jeudi matin à huis clos, et qu’ils décideront du traitement à réserver au témoin.

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