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10 Juillet 2012

Thomas Lubanga condamné à 14 ans de prison

Par Wairagala Wakabi

Le chef de milice congolais Thomas Lubanga a été aujourd’hui condamné à une peine de prison de 14 ans par les juges de la Cour pénale internationale (CPI) pour l’utilisation d’enfants soldats. Les six années passées dans le quartier pénitentiaire de la Cour seront déduits de sa peine.

« M. Lubanga est condamné pour une durée totale de 14 ans d’emprisonnement. La Chambre déduit la période s’étendant du 16 mars 2006 jusqu’au jour de son jugement », a déclaré le juge Adrian Fulford. Cela signifie qu’il purgera une peine d’un peu moins de huit ans.

Le 14 mars 2012, les juges Adrian Fulford, Elizabeth Odio Benito et René Blattmann ont déclaré M. Lubanga coupable de l’enrôlement et de la conscription d’enfants de moins de 15 ans dans sa milice de l’Union des patriotes congolais (UPC). Ils ont indiqué que l’accusé avait activement utilisé des enfants lors d’un conflit armé qui s’est déroulé dans la province d’Ituri, en République démocratique du Congo (RDC).

Dans leur verdict, les juges ont déclaré que l’accusation avait établi hors de tout doute raisonnable que M. Lubanga et ses co-auteurs avaient accepté et participé à un plan commun visant à mettre sur pied une armée pour établir et maintenir un contrôle politique et militaire sur l’Ituri. Alors que l’UPC espérait apporter la paix dans une région déchirée par les conflits ethniques, les témoignages ont montré qu’entre le 1er septembre 2002 et le 13 août 2003, il y avait eu un recrutement « systématique » d’enfants pour que la milice atteigne ses objectifs.

« L’UPC / les FPLC ont utilisé des enfants de moins de 15 ans pour les faire participer activement aux hostilités, y compris aux combats. Ils ont été utilisés, pendant la période en question, en tant que soldats et en tant que gardes du corps pour les hauts dirigeants et notamment pour l’accusé », ont conclu les juges.

Lors de la détermination de la peine, les juges sont ont indiqué avoir pris en considération la gravité des crimes et l’ampleur des dommages causés et en particulier « les préjudices causés aux victimes et à leurs familles, la nature du comportement illégal et les moyens employés pour mettre en œuvre les crimes.

Les juges ont, de plus, pris en compte le degré de participation de l’accusé, le degré d’intention, les circonstances de temps, de lieu et de manière ainsi que l’âge, le niveau d’instruction et la situation économique et sociale de l’accusé ».

Le co-accusé de M. Lubanga, demeure en liberté, malgré le mandat d’arrêt délivré par la CPI au début de 2006.

En décrivant M. Lubanga, 51 ans, comme une « personne intelligente et instruite », les juges ont affirmé que cela impliquait une compréhension des crimes et qu’il s’agissait donc d’une circonstance aggravante.

Les juges n’ont pas considéré que la violence sexuelle et les châtiments sévères qui avaient été infligés lors de la commission des crimes étaient des circonstances aggravantes car ils ne pouvaient être directement imputables à M. Lubanga.

En outre, les juges ont pris en compte la conduite de M. Lubanga tout au long du procès. Ils ont souligné qu’il « avait été respectueux et coopératif tout au long de la procédure, même lorsque qu’il avait été soumis à une pression injustifiée ».

Lors des ses recommandations relatives à la détermination de la peine, l’accusation avait préconisé que M. Lubanga soit condamné à une peine de 30 ans de prison. Les juges ont estimé qu’une telle sentence « serait inapproprié dans ce cas » puisque seules l’extrême gravité des crimes et les circonstances individuelles de la personne condamnée pouvaient être justifiées.

Pour sa part, la défense a plaidé que, outre le temps passé en détention à la CPI, le temps passé par son client lorsqu’il était assigné à résidence et détenu en RDC entre 2003 et 2006 devrait être également déduit de sa peine. La défense a argué du fait que la détention avait été imposée « en raison du même comportement [de M. Lubanga] en tant que président de l’UPC ».

Les juges ont cependant refusé de déduire cette période de la peine de M. Lubanga, affirmant que les preuves étaient insuffisantes pour déterminer si les autorités congolaises détenaient M. Lubanga pour les mêmes crimes que ceux pour lesquels il avait été condamné par le tribunal basé à La Haye.

Outre la peine d’emprisonnement, les personnes condamnées par la CPI peuvent être passibles d’amendes et être tenus de payer des indemnisations aux victimes des crimes perpétrés. Dans l’affaire contre M. Lubanga, les juges ont décidé qu’il était « inapproprié » d’infliger une amende en plus de la peine d’emprisonnement étant donné la situation financière de Lubanga.

« Aucun fond approprié n’a été identifié », a déclaré le juge Fulford.

M. Lubanga est la première personne à être jugée et condamnée par la Cour depuis sa création, il y a 10 ans. Son procès, qui a débuté en janvier 2009, a été interrompu à deux reprises et à de nombreuses occasions une suspension des procédures a été ordonnée en raison de manquements de l’accusation à respecter les décisions de la Cour. Par deux fois, les juges ont ordonné une libération inconditionnelle.

Trois autres citoyens congolais sont jugés devant la CPI, Jean-Pierre Bemba, Germain Katanga et Mathieu Ngudjolo Chui.

 

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